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Vomir la "trostlose Ungefähr"!
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5 octobre 2008

Lasciate ogni speranza, voi ch'entrate

       Puisque c'est à moi, modeste mécréant, qu'incombe la lourde tâche d'ouvrir les hostilités numériques de ce futur ramassis de futilités dont nous aurons tous honte d'ici quelques années, je resterai égal à moi-même et fuirai cette responsabilité et à travers elle la difficulté avec la légèreté que l'on me connaît, en en confiant l'embarras à d'autres.
       C'est donc Thoreau qui badinera le premier, avec cet extrait léger qui pourrait poser les premières bases de notre ouvrage à la finalité sinon absconse, du moins présomptueuse... "Tant il est facile, quoique nombre de maîtres de maison en doutent, d'établir de nouvelles et meilleures coutumes en guise des anciennes." Quelle utilité à dire celà me direz-vous ? Et pourquoi pas, vous répondrais-je ? -Assumer des responsablilités...- Disons que ça sonne bien:D... C'est que nous y pouvons trouver un écho nietzschéen, vers qui il s'agira ici de revenir finalement, en guise de présentation.
       Et puis surtout n'est-ce pas là le premier mouvement nécessaire à toute reflexion so-called philosophique ? En ma position de premier émissaire, j'occupe aussi un poste confortable : je peux me contenter de rester en surface, laissant le soin à d'autres de plonger après moi. Voici donc la première pierre posée. Il s'agit maintenant de la graver de nos noms. Et c'est Nietzsche, connu pour être celui qui "philosopha à coups de marteau" qui pourra jouer le rôle de tailleur de pierre...
       "Celui que le commerce des hommes n'a jamais fait passer par toutes les couleurs de la détresse, blêmir et verdir de dégoût, de satiété, de pitié, d'accablement et de solitude, n'est certes pas un homme d'un goût très élevé ; mais s'il n'assume pas volontairement cet ennuyeux fardeau, s'il se tient à l'écart et, comme je l'ai déjà dit, s'isole dans sa forteresse avec une muette fierté, alors une chose sera claire : cet homme n'est pas fait pour la connaissance. [...] Mais s'il a de la chance, comme il convient à un favori de la connaissance, il rencontrera des auxiliaires qui lui abrègeront et lui alègeront la tâche, je veux parler des philosophes qu'on nomme cyniques, donc de ceux qui reconnaissent en eux la présence de la bête, de la vulgarité, de la "norme" et qui, par surcroît, mettent leur esprit et leur joie secrète à parler d'eux et de leurs semblables devant des témoins; il arrive même qu'ils se vautrent dans des livres comme sur leur propre fumier. Le cynisme est la seule forme sous laquelle les âmes vulgaires accèdent à la probité ; et en présence de n'importe quel cynisme, qu'il soit grossier ou subtil, l'homme supérieur devra tendre l'oreille et se tenir heureux chaque fois que le bouffon sans vergogne ou le satyre scientifique se manifestent à haute voix. [...] Dès que l'on parle "mal" de l'homme sans même en parler méchamment, le philosophe passionné de connaissance doit prêter l'oreille avec attention, il doit même se faire tout oreilles sitôt qu'il entend parler sans indignation. Car l'homme qui s'indigne, l'homme qui se déchire, et s'écorche lui-même à belles dents (à moins qu'il ne s'acharne sur le monde, Dieu ou la société) est peut-être moralement supérieur au satyre rieur et satisfait ; dans tous les autres sens il constitue un cas plus ordinaire, moins intéressant et moins instructif. Et nul ne ment autant qu'un homme indigné." (Par-delà bien et mal ; Prélude d'une philosophie de l'avenir - paragraphe 26)
       Voilà pour la présentation des personnages ; en ce qui concerne le projet de ce blog, appelons à la rescousse Adorno, au paragraphe 97 du deuxième livre de Minima Moralia. "Celui qui ne construit rien socialement n'a aucun contenu, celui dont les impulsions ne visent pas à aider la situation sociale à se dépasser elle-même ne connaîtra lui-même aucune impulsion susceptible de dépasser la société" - mais en voilà assez ; tant de pédance... Il s'agit d'établir un espace de reflexion, non un dictionnaire de citations... "Nous ne travaillons qu'à remplir la mémoire et laissons l'entendement et la conscience vides", disait Montaigne ; faisons-le mentir.

The Dude (sometimes there's a man...)

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