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Vomir la "trostlose Ungefähr"!
Vomir la "trostlose Ungefähr"!
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16 novembre 2008

« L'on ne résout pas toutes les difficultés au moyen d'une métaphore ». (P. Nougé)

« Allons plus loin la société à qui vous imputez une si grande importance n’est pour moi qu’un canin plus ou moins dompté. Ainsi elle peut nous émouvoir comme nous sommes émus devant un regard de chien battu, et comme nos amis les canidés elle nous contraint à un nombre certain de devoirs. Elle nous mord si ne nous tenons pas nos engagements, montre les crocs si nous nous élèvons contre elle, mais le simple fait que, comme tout propriétaire affectueux faisant prendre le soleil à son fidèle compagnon sur une aire d’autoroute en l’attachant solidement au pylône adjacent pour être sur qu’il ne le suive pas, nous pouvons de droit nous affranchir de toutes structures régulatrices de l’espace politique devenant trop pressantes tend à démontrer un fait certain: nous nous inscrivons nécessairement dans un espace politisé tant que celui-ci offre une réponse conforme à l’actualisation de nos intérêts particuliers. »

Gaston Bachelard le dit avec raison peut-être : il croit à tort penser celui qui passe de métaphores en métaphores. Loin de moi l’idée cependant de vous retirer ce dont vous voulez à tout pris faire montre, et encore moins de prétendre échapper moi-même au péril de la métaphore, véritable trompe l’œil intellectuel qui, lorsqu’il semble donner à penser, fait l’esprit se mouvoir en cercle sur des images plutôt que de chercher à parler de la chose même, et nous ferions mieux de crier comme Husserl « Zu den Sachen sebst » plutôt que d’esthétiquement la contourner comme le poète qui, lui, ne vise pas la même chose peut-être que le philosophe, ou tout du moins, il semble qu’il faille leur garder deux domaines bien distincts. Pour paraphraser Kant, ce n’est pas étendre une chose que de ne pas savoir en tracer les limites ou de se refuser à le faire. C’est un appel à la rigueur philosophique qui nous conduit à préférer un retour à la chose même (TO PRAGMA AUTO). Votre problème –si problème il y a en vérité- semble être celui des rapports que l’homme entretient avec la société, qui, selon vos propos, ne serait que comme un animal de compagnie (remarquez le retour à la comparaison, que vous avez vite, malheureusement, délaissée). J’aimerais examiner avec vous les implications d’une telle comparaison (qui vous paraît peut-être tellement tentante, mais la quitter pour la métaphore constitue une pierre d’achoppement, certes délicieuse, je n’en doute pas une seconde). Selon vous, il y a donc différence de nature, différence essentielle entre société et « moi ». Peut-être votre animalisation de la société vous empêche-t-elle tout d’abord de la penser autrement que comme une entité floue, une masse indistincte, un « corps » enfin duquel il est bien aisé de parler mais qui constitue peut-être trop une évanescence intellectuelle (cette espèce de chose dont tout le monde parle et sur laquelle tout le monde a une opinion mais qui n’a peut-être aucune existence hors de vos pamphlets et tirades enflammées). Cela vous conduit à la traiter en « canin plus ou moins dompté », et j’avoue chercher encore la sens profond de cette affirmation. Votre animalisation de la société, ainsi que sa présentation comme entité distincte du moi, finit par me faire soupçonner que vous la prenez au fond pour une altérité simple, conduisant au schéma on ne peut plus classique du moi versus le monde, « ce monde » naturellement muni de ses tentacules, et nommé « enfer » plus vite qu’il ne faut sûrment. De plus, vous qui parlez de « devoirs », pensez-vous réellement les devoirs sociaux et moraux au même niveau que celui d’aller emmener un chien faire sa petite promenade ? Quelle commune mesure peut-on y trouver, que peut-on en conclure de fécond si ce n’est que vous vous êtes laissé aller encore une fois à votre poétique ? Je crois qu’il y a une attitude bien puérile à considérer l’Autre comme un chien, c’est-à-dire selon vous comme une pure contrainte donc il faudra tout prix se dégager. Pensez-vous seulement que l’homme choisisse la société, c’est-à-dire autrui, parce qu’il en a besoin et que le jour où il le désire, peut « l’abandonner » comme on abandonne une bête ? Je crois que votre idéalisme vous coûte cher. Tout cela n’aboutit en dernière instance qu’à réaffirmer cette vieille rengaine de l’homme face à la société mangeuse d’hommes et donc il s’agit à tout prix de s’extirper : en effet, quoi de plus fructueux que « d’aspirer à la solitude pour échapper à la dépendance » ? (Lacordaire).

Meretrix

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